[m] writers retreat ▪ tenté

Elliot, il a grandi dans le brouhaha de Londres, son appareil photo au bout du nez. Elliot c'est celui qui, dans la frénésie de la capitale, préférait les arrêts sur image. Ses parents auraient aimé le voir médecin, avocat, économiste, mais lui, il était bien trop passionné par l'humain pour ne pas souhaiter en faire une carrière. Il aime l'art, les livres, le beau et, lorsqu'est venu le temps des études supérieures, fatigué de Londres, il a remonté toute la carte. Il est parti étudier à Edimbourg, sur les traces de Conan Doyle et Walter Scott. C'est durant ses études en littérature, inspiré par l'Ecosse et sa qualité hors du temps, qu'il a commencé à écrire. Le succès lui est tombé dessus par hasard, et si ses romans ne lui ont pas fait amasser des milliards, il a pris l'habitude de voir son nom étalé dans les vitrines des librairies. Elliot, il avait tout. La carrière de ses rêves, le pavillon londonien, la fiancée parfaite, les projets... Il aurait dû voir la fin arriver. Après tout, il est écrivain, il connaît l'importance du climax. Il l'a atteint trop tôt, et le bonheur a explosé en vol. Trahi par sa fiancée, coeur brisé, syndrome de la page blanche, la frénésie de la métropole qui lui battait sous les tempes - il a tout quitté. Il est retourné aux racines de son inspiration, prêt à tout recommencer à zéro.

ii | be a part of the love club, everything will glow for you
Elliot et Poppy, c'était naturel. Facile, cotonneux. Ils se connaissaient de vue, à l'université, avaient quelques connaissances en commun. Il écrivait sur l'Ecosse, elle parlait gaélique, il a fait appel à son savoir.  Sans véritablement savoir comment, tout à coup, ils étaient en couple, passaient des nuits blanches à danser sur les pavés, il prenait des photos des bâtiments et elle lui racontait sa Fortingall natale, la magie d'une vie provinciale qui le fascinait. Lorsque, diplôme en poche, Elliot est reparti à Londres, ils se sont séparés comme ils faisaient tout le reste : sans drame, avec tendresse. Ils ne se sont revus qu'une fois ou deux, durant toutes ces années, mais ont gardé une correspondance suivie via email. Il lui envoyait ses projets littéraires, elle orientait quelques éléments, et sous le couvert de la collaboration, dans des longs post-scriptum, c'était leurs vies qu'ils se racontaient. Elle a mentionné la mort de son père, le départ de sa mère, cette grande maison vide. Il lui parla de son coeur brisé, de son dégoût de Londres. Bien des années plus tôt, à Edimbourg, elle avait étendu la proposition avec facilité, lui avait dit qu'il serait toujours le bienvenu à Fortingall. Sur un coup de tête, il lui demanda si l'invitation tenait toujours. S'il pouvait venir chercher l'inspiration chez elle, temporairement. Une semaine plus tard, il débarquait, le premier de l'an, une valise et quelques cartons sous le bras. Il a recommencé à écrire, elle a recommencé à respirer. A évoluer dans sa propre maison avec aise, depuis qu'il la remplit du son des touches de son clavier, de l'odeur du café et de son rire communicatif.